Quand la Bourse peine à séduire face au rouleau compresseur du private equity

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Des introductions en Bourse en baisse constante et des retraits de cote en augmentation confirment le désamour des entreprises pour les marchés financiers au profit des fonds d’investissement qui leur offrent des financements souples et abondants.

Le succès de l’introduction en Bourse de la Française des Jeux sonne-t-il enfin la fin de la désaffection pour les marchés financiers? 2019 s’annonce comme la meilleure année boursière depuis deux décennies. Le CAC 40 a engrangé plus de 26 % depuis janvier, une performance remarquable, mais qui ne va profiter au final qu’à des « happy few ». Car le nombre d’actionnaires individuels n’a cessé de fondre. La dernière fois que le CAC 40 a franchi la barre des 6.000 points, en 2007, la France comptait 7 millions d’actionnaires individuels. Depuis, le nombre de petits actionnaires a été divisé par deux et ceux-ci ne sont plus que 3 millions, d’après les statistiques de l’AMF. Et il en va de même pour les entreprises cotées dont le nombre n’a cessé de décroître irrémédiablement. Au total, depuis 2007, le nombre de sociétés présentes en Bourse a fondu de 15 % à Paris, et de 20 % sur l’ensemble des pays d’Euronext. Le baromètre des IPO d’EY publié fin septembre souligne une baisse de 26 % du nombre d’introductions en Bourse dans le monde sur les neuf premiers mois de 2019, comparé à la même période de 2018, cette baisse étant de 40 % en Europe. Sous les radars des grands investisseurs, soumises à des aléas de valorisation exogènes à leurs performances, et privées d’un flottant significatif, les ETI tournent de plus en plus le dos à la bourse au profit des fonds de private equity qui leur ouvrent grand les bras, et leur promettent outre l’argent facile, une machine de guerre rodée aux projets de transformation et de croissance des entreprises de leur portefeuille.

Le PE a détrôné la Bourse aux US

Cette concurrence asymétrique entre le « public equity » et le « private equity » est encore plus flagrante outre-Atlantique où les tendances émergent avec quelques années d’avance sur le Vieux Continent. Aux Etats-Unis, la désertification de la Bourse est carrément jugée alarmante avec la division par plus de deux du nombre d’entreprises cotées en vingt ans. Une tendance si lourde que l’économiste Patrick Artus, de Natixis, se demandait dans une note parue en 2018 si le capitalisme américain serait « bientôt complètement non coté ». D’après le dernier rapport mondial de Bain&Cie sur le private equity, les entreprises américaines accompagnées par les actionnaires du capital investissement ont doublé en dix ans pour atteindre près de 8000 sociétés en portefeuille, soit deux fois plus que les entreprises cotées. Ce qui illustre bien le mouvement de vases communicants entre une Bourse boudée par les entrepreneurs et l’engouement sans précédent pour les fonds de private equity. Ces derniers sont à la tête de quelque 2000 milliards de dollars de « dry powder » à investir dans les quatre prochaines années. Autant dire que cet afflux de liquidité des investisseurs privés qui déroulent le tapis rouge aux entreprises réduit drastiquement l’intérêt d’une cotation avec ce qu’elle représente comme contraintes et aléas.

 

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