COVID-19 : la justice contraint Amazon à restreindre son activité aux marchandise essentielles.

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COVID-19 : la justice contraint Amazon à restreindre son activité aux marchandise essentielles.
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Coup dur pour Amazon.

 

Saisi en référé le 8 avril dernier par l'union syndicale Solidaires (Sud), le Tribunal Judiciaire de Nanterre vient de rendre une ordonnance sévère pour la multinationale, dans laquelle il considère que « La société Amazon France Logistique a, de façon évidente, méconnu son obligation de sécurité et de prévention de la santé des salariés ».

 

En attendant l’évaluation des risques professionnels liés à l’épidémie du COVID-19 et la mise en place des mesures adaptées pour prévenir le risque sanitaire, la société est tenue de restreindre l’activité de ses entrepôts aux marchandises essentielles à savoir « la préparation et l’expédition des commandes de produits alimentaires, de produits d’hygiène et de produits médicaux ».

Cette décision, qui sera lourde de conséquences pour la société et pourrait considérablement réduire son chiffre d’affaires sur le sol français, est le fruit d’un minutieux contrôle judiciaire sur les mesures prises par la direction dans le cadre de l’épidémie du COVID-19.

La décision apparaît dans son ensemble critique à l’égard de la gestion des risques liés au COVID-19 par la branche logistique de la multinationale puisque l’essentiel des demandes formulées par l'union syndicale Solidaires (Sud) a été retenue par le juge NDLA : [a été rejetée par le Tribunal Judiciaire, la demande de fermeture pure et simple des entrepôts].

Ces mesures dont l’application était demandée, se fondaient sur l’article L. 4121-1 du Code du Travail, qui dispose que : « L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. » Ces obligations prévues par la loi consistent en l’adoption de « mesures de prévention des risques professionnels », « d’actions d'information et de formation » ainsi que de la mise en place d'une » organisation et de moyens adaptés. » que l’employeur est tenu de faire évoluer : « pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes ».

L’énumération des insuffisances ou inconséquences d’Amazon dans l’évaluation des risques et l’application des mesures.

Les juges relèvent en premier lieu qu’aucun procès-verbal de réunions des Comités Sociaux Economiques (CSE), ni du CSE central de l’entreprise ou aucune autre preuve des échanges tenus au cours de ces réunions n’ont été versés aux débats et en a déduit que les instances représentatives du personnel n’avaient pas été associées à l’évaluation des risques que la direction aurait menés.

Les juges rejettent dans un second temps les demandes du syndicat fondées sur le défaut de recensement et d’outils de suivis des cas de contamination, en constatant que même si le caractère imprécis et insuffisamment explicite de la procédure mise en œuvre en cas de contamination était caractérisé, des outils de suivi et des mesures de protection ont tout de même été mis en place par la société.

Les juges procèdent ensuite à un contrôle sur les évaluations des risques particuliers. Il est à cet effet relevé que les risques de contamination s’agissant de l’usage d’un portique de sécurité ou de l’utilisation des vestiaires n’ont pas fait l’objet d’une évaluation suffisante.

Par ailleurs, les juges observent dans leur décision que la société n’a pas apporté la preuve d’avoir averti les entreprises partenaires extérieures (entreprise de travail temporaire, de nettoyage ou de sécurité), des plans de prévention actualisé relatifs aux protocoles de sécurité prévus à l’égard des transporteurs (nettoyage des mains, encadrement des opérations de chargement ou déchargement, nettoyage des chariots) comme cela lui avait été demandé.

Les juges constatent par la suite que le risque de contamination tenant aux manipulations successives des objets n’a pas fait l’objet d’une évaluation et que l’effectivité des mesures de distanciation sociale n’est pas démontrée. Il est rappelé à ce titre qu’au cours de leurs contrôles, les inspecteurs du travail ont observé des non-respects ponctuels dans l’application de ces mesures.

Les juges affirment ensuite que les mesures de formation des personnels « ne sont pas ni suffisantes et ni adaptés au regard des risques élevés de contamination liés à la nature de l’activité de l’entreprise. »

Ils relèvent enfin que la société n’apporte aucune preuve démontrant qu’elle ait évalué les risques psycho-sociaux liés à l’épidémie dans les Documents Uniques d'Evaluation des Risques Professionnels (DUERP)

 

Une décision intransigeante qui impose une réorganisation rapide de la multinationale.

Fort de tous ces motifs, le Tribunal a ainsi pu ordonner à la société Amazon de procéder à l’évaluation des risques professionnels et de mettre en œuvre les mesures en découlant, en application de l’article 4121-1 du Code du Travail.

Dans l’attente de la mise en application de ces obligations, le jugement impose à la société Amazon, sous 24 heures et sous astreinte d’une amende dissuasive d’un million d’euros par jours de retard, de limiter l’activité de ses six entrepôts aux seules « activités de réception des marchandises, de préparation et d’expédition des commandes de produits alimentaires, de produits d’hygiène et de produits médicaux ».

Se déclarant « en désaccord avec la décision rendue aujourd’hui par le tribunal judiciaire de Nanterre », la société Amazon compte faire appel de cette décision. La société ne pourra toutefois pas contester l’application de l’astreinte dans les prochains jours et devra réorganiser au plus vite son organisation interne, pour limiter son activité aux livraisons admises et se conformer aux exigences qui lui sont imposées.

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