La mise à pied disciplinaire : une sanction à part entière

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De l’importance du règlement intérieur. Posons tout d’abord, en principe directeur, que, pour être valable, la mise à pied disciplinaire doit être prévue par le règlement intérieur (Cass. soc.  2-12-2013 no 12-22.642) lorsque celui-ci est légalement obligatoire, soit dans les entreprises d’au moins 20 salariés.

La cour d’appel d’Orléans, saisie de la problématique, a rendu récemment une décision éclairante. Les faits de l’espèce mettaient en cause une société d’au moins 20 salariés, au sein de laquelle aucun règlement intérieur n’avait été mis en place. L’employeur avait prononcé une mise à pied à l’encontre d’un salarié et ce dernier en avait demandé l’annulation devant le conseil de prud’hommes, ce qui lui avait été accordé. La cour d’appel a confirmé cette décision en précisant très justement qu’une mise à pied prononcée, alors qu’elle n’est pas prévue par le règlement intérieur de l’entreprise, est nulle (CA Orléans 20-5-2014 no 346-14). La vérification de la conformité de l’entreprise à ses obligations normatives s’impose.

Ensuite, il convient de relever que le règlement intérieur doit également prévoir formellement la durée maximale de la mise à pied. Dans le cas où un employeur sanctionnerait un salarié en le mettant à pied alors que la durée de cette mise à pied n’est pas précisée dans le règlement intérieur, celle-ci serait alors inévitablement entachée de nullité. A l’appui de ce postulat, un arrêt de la Cour de cassation du 7 janvier 2015 vient nous éclairer. Dans cette affaire, le règlement intérieur de l’entreprise prévoyait, dans la liste des sanctions pouvant être prises, la mise à pied disciplinaire mais il n’en prévoyait pas la durée. En revanche, cette dernière était prévue par la convention collective applicable. L’employeur avait donc prononcé une mise à pied en se référant à la durée mentionnée dans l’accord de branche.

La question posée était donc de savoir si la convention collective pouvait pallier les insuffisances du règlement intérieur. La cour d’appel de Reims  avait admis cette possibilité, mais la Cour de cassation a censuré sa décision. La Haute Juridiction considère en effet que l’absence de mention de la durée maximale de la mise à pied dans le règlement intérieur ne peut pas être suppléée par les dispositions de la convention collective applicable, même étendue. Par cette décision, la Cour de cassation confirme le rôle fondamental du règlement intérieur en matière disciplinaire. La mise à pied
prononcée doit donc être annulée et l’employeur doit procéder à la modification de son règlement intérieur (Cass. soc. 7-1-2015 no 13-15.630 : RJS 3/15 no 186).

Une sanction justifiée et proportionnée

Pour être sanctionné par une mise à pied disciplinaire, le salarié doit avoir commis des faits fautifs d’une certaine gravité. Sous le contrôle du juge, l’employeur se doit de respecter le principe légal de proportionnalité entre la sanction prononcée et la faute commise. Les faits doivent être assez graves pour qu’un simple avertissement ne suffise pas, mais pas assez pour permettre un licenciement. Tout est question de dosage ! Ainsi, une mise à pied peut être justifiée en cas d’insubordination de la part du salarié (Cass. soc. 2-12-2014 no 13-28.505) ou encore du refus de celui-ci de se soumettre à un changement d’horaires de travail (Cass. soc. 31-10-2006 no 04-48.063). Il est capital que les faits soient matériellement vérifiables et surtout qu’ils soient objectifs. Ce dernier point est illustré dans un arrêt de la Cour de cassation du 30 septembre 2014. Dans cette affaire, un salarié ayant démissionné s’est vu notifier une mise à pied disciplinaire durant l’exécution de son préavis. Si l’employeur a toujours la possibilité de sanctionner un salarié qui a commis une faute en cours de préavis, ce n’était pas le cas dans l’espèce puisque le salarié n’en avait pas commis. La Cour de cassation a considéré que la mise à pied était exclusivement motivée par la démission du salarié et qu’il s’agissait donc d’une mesure vexatoire de la part de l’employeur. Le salarié a non seulement obtenu la nullité de la mise à pied, mais également des dommages et intérêts en raison du caractère vexatoire de la mesure (Cass. soc. 30-9-2014 no 13-16.394).

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